vendredi 8 mai 2015

Comment l'extrême-droite communique





Ménard a-t-il tenu un fichier sur base ethnique ?  Les propos tenus par cet élu indignent car ils évoquent les plus sombres pages de l’histoire de nos pays, « l’esprit 1939 » selon les mots de Christiane Taubira.  Une telle pratique, touchant des enfants, liant abusivement prénom et confession religieuse est non seulement imbécile, mais foncièrement islamophobe.


On ne sait pas si Ménard a réellement tenu un fichier ethnique.  L'enquête nous le dira.  Il a droit comme tous à la présomption d'innocence.  Mais on est en droit de porter un jugement sur les propos qu'il a tenus.  Et il ne fait aucun doute pour moi, que cet homme sait parfaitement ce qu'il fait et pourquoi.


Non, ce n’est pas un « con ».  Il ne fait qu’utiliser une excellente stratégie de communication.  Il sait que ses propos choqueront.  Il sait qu’il va créer le buzz et qu’on va parler de lui. Il n’en est pas à sa première polémique.  Chacune de ses interventions sont destinées à toucher un certain électorat. Il s’offre l’image de l’homme « qui dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas ».  Attiser la haine envers les musulmans, c’est bien là le fonds de commerce de l’extrême-droite.  La crainte de l’islamisme, de la radicalisation, c’est du pain bénit pour ces élus.  Citer un pourcentage important  de musulmans dans sa ville, c’est agiter le spectre du grand remplacement, de l’islamisation.  Et tous les fantasmes : « Nos filles seront toutes voilées » et  «bientôt,  on appliquera la charia ». Et surtout, « nous ne sommes plus chez nous ! ».  Ses électeurs ne vont pas remettre en question ses chiffres.  Ne vont pas se poser la question de leur pertinence.  Aux problèmes complexes, l’extrême-droite offre une réponse simpliste.  Le bouc émissaire est trouvé.  Hier c’était les étrangers.  Aujourd’hui, ce sont les musulmans.

Ce qui me choque le plus, ce n’est pas le fait qu’un élu d’extrême-droite tienne de tels propos. On ne peut attendre d’eux que le pire. 

Ce qui me choque, c’est qu’on minimise, qu’on banalise. Qu’on  compare le fichier ou les statistiques bidon de cet élu à des recherches en sociologie.  Qu’on compare avec des fiches de renseignements à l’usage des moniteurs de camps de vacances.  Comme si l’on pouvait être aveugle aux buts poursuivis par un élu d’extrême-droite s’il tenait ce genre de fichier.

Ce qui me choque c’est qu’exprimer son indignation soit considéré comme la preuve d’une incapacité de comprendre et d’analyser.  Je vomis la tiédeur.  La fausse objectivité cachant une vraie indifférence.  Le cul dans son fauteuil, sûr de ne jamais perdre ses privilèges.

Nous avons été accusés, dans notre groupe, de nous faire le relais de ce genre de propos et quasi d’offrir une tribune aux idées de  l’extrême-droite.  Il faudrait donc nous taire ?  Ce n’est pas en évitant le sujet qu’on va empêcher la progression de l’extrême-droite.  Ce n’est pas dans un groupe réunissant en majorité des membres opposés au racisme que l’on doit éviter de commenter et d’analyser les comportements des élus de l’extrême-droite.  Et ce n’est qu’en comprenant ce qui séduit dans leur discours que l’on pourra construire un contre-discours.





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire