mardi 19 mai 2015

C'était des gamins normaux









C’était des gamins normaux de Clichy-sous-Bois.

Une zone urbaine « sensible ».  Un taux de chômage 2 à 3 fois plus élevé que dans le reste du pays.

Un coup de fil au commissariat parce qu’on a vu « un groupe de plusieurs jeunes » s’introduire sur un chantier.  On se doute qu’ils vont y faire « quelque chose de louche ».  Des jeunes en bande.  Noirs et Arabes.

En fait, ces jeunes n’ont fait que passer devant ce chantier en revenant d’un match de foot.

A l’arrivée de la police, les jeunes détalent.  C’est un réflexe.  Mais pourquoi fuir devant la police, s’ils n’ont rien fait ?  Ils courent parce qu’ils voient les autres courir,  parce qu’ils n’ont pas leurs papiers,  qu’ils ne veulent pas finir la nuit au poste et subir les engueulades de  leurs parents.  Des décennies de mauvais rapports entre la police et ces jeunes.  Ils courent.  C’est la panique au point de se réfugier dans un endroit où ils risquent leur vie.

Communication entre policiers : « Les deux individus sont localisés et sont en train d’enjamber pour aller sur le site EDF. »

Puis, plus rien.  La police quitte les lieux.

La ville entière est plongée dans le noir pendant 24 secondes.  Au moment où le transformateur a disjoncté et a tué sur le coup Zyed et Bouna.

10 ans plus tard.  Le tribunal  relaxe les deux policiers poursuivis pour non-assistance à personne en danger. Pour le juge, ils n'ont jamais "eu conscience de l'existence d'un péril grave et imminent".

Il y a des questions qui ne seront jamais posées.   « Pourquoi des jeunes de quartier populaire, à la vue de la police et alors qu'ils n'avaient manifestement rien à se reprocher, ont préféré prendre la fuite et se réfugier dans un endroit où ils risquaient leur vie ? », s'interroge SOS Racisme.

« Manifestement, notre pays a une grande capacité à s'émouvoir pour ce qui se passe à Ferguson, aux Etats-Unis, et identifie avec une déconcertante facilité les mécanismes du racisme et du contrôle sécuritaire des territoires où vivent des Afro-Américains. Par contre, cette lucidité s'envole comme par magie lorsqu'il s'agit de regarder notre société en face et d'en analyser les dysfonctionnements. »

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